[Chronique Littéraire] Kerys – T3 : Celles dont le nom fait frémir, Catherine Loiseau

   Aujourd’hui, nous clôturons une trilogie de steampunk lovecraftien, avec Kerys -T3 : Celles dont le nom fait frémir, de Catherine Loiseau (Collectif Hydralune).

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FICHE TECHNIQUE

  • Titre : Kerys – T3 : Celles dont le nom fait frémircvt_celles-dont-le-nom-fait-fremir_8959
  • Auteur/Autrice : Catherine Loiseau
  • Illustrateur/Illustratrice : Mlle Sue
  • Édition : Hydralune
  • Collection : /
  • Genre : Steampunk lovecraftien
  • Public : Adulte
  • Cycle : Oui (3/3)
  • Pages : 476
  • Parution : 10 juin 2019
  • Langue : Français
  • Format : Numérique – Broché
  • Prix :  2,99 euros – 18 euros
  • ISBN : 979-10-94812-45-7
  • Lien : Hydralune : Kerys T3

Résumé : Branle-bas de combat à Sainte-Victoire : les Dévoreuses arrivent !

Les mercuriens et leurs nouveaux alliés doivent faire face à la plus grande menace qu’ils aient jamais affrontée et le sort semble se liguer contre eux. Déjà attaqués dans l’ombre par les individualistes de Maréchal et les Indicibles menés par Orchua, voilà qu’un général ambitieux tente de profiter de la situation pour prendre le contrôle des brigades et que la flotte austrénienne attaque.

La plus importante bataille des mercuriens s’annonce bel et bien serrée !

Celles dont le nom fait frémir conclut la série Kerys, trilogie mariant action, steampunk et ambiance lovecraftienne, le tout sous forme de comédie !

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MON AVIS

Bulle d'Eleyna Logo 2

Lu dans le cadre du 8e Challenge Littérature de l’Imaginaire.

Lu dans le cadre du Printemps de l’Imaginaire Francophone 2020.

Chronique du tome 1, tome 2, recueil et de la nouvelle.

Attention, probables spoilers sur les précédents tomes.

 

Couverture et Accroche

    Il s’agit de la couverture que j’aime le moins de toute la saga Kerys, y compris en comptant les nouvelles. Si j’apprécie la logique de mettre en avant Artémise, le troisième personnage principal après Honoré et Erika, et que je trouve la composition intéressante, je trouve en revanche que l’ambiance ne colle pas vraiment à celle que j’ai ressenti lors de ma lecture. Le choix esthétique pour la représentation de Celles dont le nom fait frémir lui donne un effet trop stylisé qui ne favorise pas le rapprochement avec une atmosphère lovecraftienne, pourtant revendiquée (même si on s’empresse de rappeler que c’est plus léger). Bref, pour moi, ça ne fonctionne pas, mais je comprends l’intention et je ne remets pas en cause le talent de l’illustratrice qui n’a certainement fait que suivre la demande de l’autrice.

   Concernant le résumé, je le trouve bien dosé, même si je regrette juste cette traditionnelle dernière phrase éditoriale qui, comme souvent, s’avance sur un point pour appâter le lecteur. Pour d’autres, on vante les mérites de l’auteur, ici on parle de comédie. Or, il y a certes de l’humour, des comic reliefs assumés et une insistance sur l’atmosphère plus légère qu’un récit de Lovecraft, mais je ne trouve pas que ça suffise pour inscrire le tome et même la trilogie dans le registre de la comédie. Par rapport à Lovecraft, certainement, mais on part de loin tout de même. A titre de comparaison, le reste de la production littéraire possède elle aussi souvent son comic relief et ses échanges humoristiques. Bref, c’est du chipotage, mais ça m’interroge sur l’importance que l’on donne à l’humour et la légèreté dans un récit, un peu comme si ça ne pouvait être réservé qu’à un genre particulier.

 

Prose et Structure

    Je vous invite à lire les précédentes chroniques pour retrouver mon avis sur le style de l’autrice, puisque celui-ci est constant dans mon appréciation subjective de ses qualités et ses faiblesses. Globalement, c’est très agréable à lire et l’humour est bien dosé. Puis, j’ai fini par me faire une raison, certains lecteurs adorent les roucoulades entre persos. 😉

   Concernant la structure, je ne m’attarderai pas sur le découpage du récit en tant que tel, mais plutôt sur un motif présent durant les scènes qui font avancer l’intrigue. Il arrive en effet que l’autrice, non contente de nous montrer l’action en question, nous la raconte par la suite sous forme de dialogues explicatifs où les personnages rappellent qui a fait quoi et pourquoi (« ah mais c’est pour ça que Truc a fait ça et Bidule est parti par là… »). Un accompagnement du lecteur parfois trop poussé à mon sens, et qui donne l’impression que l’autrice n’est pas sûre d’être comprise au premier essai. Certes, la motivation est louable, mais je trouve cette façon de régler un possible problème de compréhension trop récurrente, ce qui ternit la satisfaction du lecteur qui comprend par lui-même les enjeux et les subtilités du texte. Je dirais même qu’une subtilité comprise est une récompense pour un lecteur attentif, et que ça devrait le rester. Quoi qu’il en soit, il s’agit de mon avis, et je me doute qu’au contraire, bien d’autres lecteurs seront rassurés de se voir expliquer certaines scènes.

 

Personnages et Narrateurs

    Une fois encore, vous serez ravis d’apprendre que le beau rôle est donné aux femmes, puisque c’est majoritairement sur elles que le sort du monde repose. 😉

    Je commencerai donc par le capitaine Honoré Rocheclaire, seul protagoniste principal masculin de la troupe qui perd encore un peu de son sens de l’humour, la faute cette fois à son inquiétude plus ou moins légitime concernant sa femme enceinte. Je l’ai trouvé un peu en retrait dans ce dernier tome, assez peu acteur de sa vie et finalement plutôt suiveur d’ordre. En tant que capitaine, il a l’habitude, mais on sent qu’il ne maîtrise rien, et comme il perd facilement de sa vivacité d’esprit en présence des deux femmes de sa vie, ça le rend à mes yeux moins intéressant. Il conserve néanmoins une présence assez charismatique, mais ce n’est pas à mon sens le personnage qui aura eu la meilleure évolution.

    Artémise Rocheclaire est certes toujours l’infirmière en chef des brigades, mais elle est aussi et surtout enceinte. Un fait qu’on lui rappelle un peu trop souvent à son goût, ce qui a le don de l’agacer prodigieusement. Autant cela peut se comprendre durant les premiers mois, autant sur la fin elle devient tête à claques à se mettre inutilement sur le devant de la scène (et à ne pas former d’équipe pour l’accoucher… pour une femme soit-disant prévoyante…). Hélas, je trouve que l’autrice lui donne trop souvent raison, puisque ce personnage qui prend rapidement du galon n’a jamais une seule erreur de jugement, mène tout le monde par le bout du nez et prend obligatoirement les décisions les plus justes. Une erreur personnelle aux réelles conséquences dramatiques aurait eu à mon sens bien plus d’intérêt pour son arc narratif qu’un ressassement sur son ventre arrondi. Malgré tout, c’est un personnage attachant et je comprends qu’elle soit devenue plus importante que son mari.

   Erika Zhaan, violoniste austranienne et amante d’Honoré, m’a semblé moins importante durant ce dernier tome. On la voit moins jouer de son charme et si elle monte souvent au front avec son violon modifié, elle ne fait pas vraiment de démonstration qui justifie d’être qualifiée d’humaine la plus puissante de la troupe. La faute peut-être à son insertion dans l’intrigue. Au combat, elle est souvent accompagnée par d’autres musiciens, et en infiltration, elle se retrouve finalement isolée de son instrument. Puis, il faut dire qu’elle a une rivale en terme de maniement de violon…

   Ripley, puisque c’est d’elle dont il est question, est certes une androïde froide au raisonnement cartésien, mais qui apprend peu à peu les émotions humaines. On sent où son évolution tend à aller, son arc narratif est assez logique et je dois dire être reconnaissante envers l’autrice d’avoir su l’arrêter au bon moment. Il s’agit d’un de mes personnages préférés et j’aurais détesté la voir totalement changée. Une jolie fin de parcours pour elle donc, je suis plutôt ravie.

   Eléonore, ou Léo, démontre toute son importance dans ce tome en temps qu’officier scientifique des brigades. Dans cette course contre la montre pour contrer l’arrivée des Dévoreuses, il faut dire que ses compétences techniques sont devenues indispensables, autant que son apparente assurance en cas d’urgence (ce qui, avouons-le, arrive très souvent dans ce tome ^^). Un personnage qui aura bien évolué tout au long du récit et que j’ai adoré suivre.

    Je terminerai par Abriel qui, je n’en doute pas une seconde, fera partie des personnages préférés de la plupart des lecteurs. Apparu dans le tome 2, il s’agit d’un Indicible, un chef des Abominations, qui contrairement à ses semblables, a préféré s’allier avec les humains. De caractère enjoué et enjôleur, il a le profil type du personnage secondaire extrêmement sympathique, cordial, dévoué, un brin touchant dans sa naïveté, et façonné pour détendre l’atmosphère. Pas grand chose à en dire de plus, il remplit son rôle à merveille et charmera plus d’un lecteur.

 

Univers et Atmosphère

    L’histoire se déroule toujours à Kerys, cette île d’inspiration victorienne où se retrouve des éléments de steampunk, certes un peu moins mis en avant dans ce dernier tome. On fait aussi un petit détour par Paris, puisque notre monde est parallèle à celui de Kerys (on y retrouve d’ailleurs des « doubles » des protagonistes), mais aussi et surtout, on pose les pieds sur le continent, puisqu’une mission mène nos protagonistes en Austranie, pays rival de Kerys. On n’aura pas hélas de visite guidée de la région puisque la mission est assez courte, mais on apprend tout de même que le pays est très austère et mal doté pour faire face à la menace des Dévoreuses. Bref, pas de quoi se réjouir, et on comprend mieux pourquoi ce pays réagit au quart de tour quand il pense sa sécurité menacée.

    Si des colonies sont toujours en guerre contre les humains, les Abominations ne sont désormais plus les ennemis principaux, puisque une nouvelle espèce, plus terrifiante encore, est annoncée depuis la fin du tome 2. Ces Dévoreuses, dont le nom fait frémir donc, ne seront pas sans vous rappeler les Grands Anciens de Lovecraft dans leur aspect terrifiant et fascinant, tellement ignoble qu’il en devient indescriptible. Leurs assauts, qui arrivent assez rapidement dans le tome, sont eux-mêmes assez difficiles à décrire puisque déroutants pour ceux qui y assistent. Cela donne une impression de malaise à la lecture qui colle bien avec l’ambiance désirée, d’autant qu’on ne comprend pas très bien la logique dans la séquence et la longueur des attaques. Mais, en terme d’horreur, il ne vaut mieux pas tout expliquer. )

 

Intrigues et Thématiques

    Honoré, Artémise, Erika et les brigades du mercure doivent faire face à la plus grande menace qui soit : des entités dévoreuses de mondes s’apprêtent à engloutir leur terre, attirées par les Abominations qui les ont entraînées dans leur sillage. Si les repousser semble être une tache désespérée, ils devront aussi composés avec les Abominations rebelles, les individualistes qui cherchent toujours à déstabiliser le gouvernement, mais aussi l’Austranie qui semble plus que jamais vouloir déclarer la guerre à sa rivale.

   Avec le changement de menace évolue aussi l’intrigue puisque la lutte des brigades du mercure est annoncée comme vaine par les Abominations qui ont tenté d’envahir leur monde. Charge donc à toute l’équipe de leur démontrer le contraire en trouvant une solution radicale pour repousser ces dévoreuses de mondes. Pour autant, si la situation semble en elle-même assez catastrophique, l’autrice a décidé d’y associer des problématiques plus humaines, en poursuivant l’intrigue sur les individualistes déjà développée dans le tome 2, mais aussi, en ajoutant la menace d’une guerre avec l’Austranie ou des négociations avec le gouvernement parisien. Autant j’adore les intrigues qui s’entremêlent, autant ici je me suis demandée si la mission d’infiltration était vraiment utile au récit, car globalement, ces intrigues secondaires ont une résolution rapide et définitive, qui donne une impression de précipitation (peut-être voulu par l’autrice, même si j’ai davantage eu l’impression d’un manque de pages que d’un manque de temps pour nos protagonistes). Aurait-il mieux fallu se consacrer aux autres intrigues, ou bien rallonger de quelques pages le récit ? Après, je reconnais que la trilogie ne s’adresse pas aux fans hardcore des gestions de crises géopolitiques et que l’ensemble est plaisant à lire pour tous les publics.

    Je vais peut-être vous surprendre, mais la romance à trois prend moins de place que durant les précédents tomes. Ceci est remplacé par un rappel constant qu’Artémise est enceinte, mais plus résistante que tout le reste des brigades. A croire qu’il faille toujours trouver une problématique féminine pour rabaisser ces hommes qui prennent leurs aimées pour des choses trop délicates. Certes, j’ai bien compris que répéter sans cesse les recommandations pour femme enceinte était destiné à nous faire prendre conscience du harcèlement subit par ces dernières. De là à faire que toute joute verbale se solde par une victoire féminine, quel que soit le sujet et les circonstances… Chacun sa définition du féminisme, va-t-on dire, et j’imagine que beaucoup de lectrices seront ravies d’y voir des femmes fortes et plus compétentes que leurs homologues masculins. Je n’aurais pas été contre une erreur ou deux, afin de démontrer qu’elles sont avant tout humaines.

    Je sais que cette chronique semble s’attarder sur les points négatifs. Mais d’une part, je constate que je ne fais que reprendre mes réflexions d’un tome à l’autre, ce qui démontre que la trilogie est cohérente aussi bien sur le fond que la forme et constitue un tout uniforme qui doit se lire agréablement d’une traite sans donner l’impression d’évolution qualitative brutale, comme il arrive parfois dans certaines sagas (et alors, il devient difficile de relire les premiers tomes). D’autre part, je chipote sur le féminisme (qui pour moi doit être une égalité de traitement), mais c’est le cas dans tous les ouvrages que je chronique. Cela ne m’empêche pas de les apprécier. J’ai beaucoup aimé la trilogie et les nouvelles qui s’y rapportent, de par l’ambiance unique mêlant légèreté et horreur, les personnages attachants même si parfois agaçants, l’évolution de l’intrigue et la conclusion à la touche un peu SF. C’était pour moi un excellent voyage littéraire et je ne doute pas que ce sera le cas pour de nombreux lecteurs. 🙂

 

Conclusion

   Celles dont le nom fait frémir conclut de belle façon la trilogie de Kerys. Si j’ai de petits reproches subjectifs à faire, j’ai trouvé ce tome intéressant à suivre, notamment dans la gestion de la menace grandissante des Dévoreuses et la conclusion de certains arcs narratifs. Une série qui m’aura globalement bien plu et que je conseille à tout ceux qui voudraient appréhender le steampunk et le mythe lovecraftien de façon légère sans perdre toute l’horreur de son bestiaire.

 

Et vous, qu’avez-vous pensez de cette fin d’aventure ? 🙂

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UN APERÇU D’AILLEURS SUR

Kerys – T3 : Celles dont le nom fait frémir ?

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