[Chronique Littéraire] Pandemonium – Requiem pour un croque-mort, Aurélie Mendonça

   Nouvelle chronique pour le Printemps de l’Imaginaire Francophone avec aujourd’hui une bulle pour parler de Pandemonium, Requiem pour un croque-mort, d’Aurélie Mendonça.

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 FICHE TECHNIQUE

 

  • Titre : Pandemonium, Requiem pour un croque-mort26220436_1918631864831345_8439696698510714626blog_o
  • Auteur/Autrice : Aurélie Mendonça
  • Illustrateur/Illustratrice : Emilie Garcin
  • Édition : Du Chat Noir
  • Collection : Féline
  • Genre : Urban Fantasy
  • Public : Jeune Adulte, Adulte
  • Cycle : One-Shot
  • Pages : 292
  • Parution : 14 février 2018
  • Langue : Français
  • Format : Numérique – Papier
  • Prix : 5,99 euros – 19,90 euros
  • ISBN 978-2375680643
  • Lien : Du Chat Noir : Pandémonium

Résumé : Chacun à sa manière cherche le sens de la vie. Moi, j’essaie au quotidien de donner du sens à la mort.
Je me nomme Elena Lautturi et je suis thanatopractrice. Croque-mort autrement dit. L’image ne manque pas de mordant… Des civilisations plus anciennes m’auraient désignée comme une passeuse d’âmes. Ce que je suis, au figuré comme au propre…
Une mésaventure aux enfers a fait de moi l’employée spéciale de la déesse Hela. Ma mission est simple : m’assurer que chaque âme destinée à son royaume arrive à bon port, tout cela sous couvert de mon humble entreprise de pompes funèbres, le Pandemonium.
L’enfer est un lieu complexe et je fais partie des nombreux rouages qui permettent son bon fonctionnement. Malgré mon professionnalisme, il apparaît évident qu’une entité inconnue et puissante me considère plus comme le grain de sable dans la machine.
Aujourd’hui, je suis menacée…
Moi et le destin de toutes ces âmes qui dépendent de mes soins…

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MON AVIS
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Couverture et Accroche

   La couverture photographique d’Emilie Garcin, mettant un jeune femme en noir et blanc en avant, annonce tout de suite le genre et le public cible. Je dois dire que si l’urban fantasy n’est pas mon genre de prédilection, l’atmosphère rendue par le choix de l’image et la mise en page est plutôt intrigante. Le jeu avec le titre est d’ailleurs intéressant dans la mise en avant de sa double symbolique (dont les deux aspects sont certes liés). J’apprécie un peu moins les oiseaux, trop nombreux à mon goût.

   J’aime beaucoup l’honnêteté du résumé. Il annonce non seulement l’intrigue et le personnage principal, mais aussi le style de narration et le ton du récit. Il fait partie de ces quatrièmes de couvertures qui ne ressemblent pas tant à un exercice de style cherchant à convaincre un lecteur potentiel par des artifices parfois flagrants, qu’à quelques lignes complémentant le récit (cela pourrait-être un court prologue par exemple). J’aime beaucoup quand un résumé à cette fonction. Seul bémol pour moi, la phrase d’accroche finale. Je n’ai jamais aimé les phrases commençant par « MOI et les autres ». ^^

 

Prose et Structure

   Le récit est écrit au présent et à la première personne, puisqu’il s’agit de suivre le point de vue de la protagoniste, Elena. La plume est fluide et percutante, elle garde la simplicité et la philosophie de celle qui nous guide. D’ailleurs, l’autrice assume de s’adresser directement au lecteur, cela se retrouve plusieurs fois dans l’ouvrage. Rien de dérangeant en vérité, j’y ai même vue, là encore, une recherche d’honnêteté. Parce qu’il est évident que le personnage porte une part autobiographique de l’autrice, il me semblait important que le personnage soit détaché du lecteur. On ne la suit donc, non comme un alter-ego littéraire ou un substitut à nos besoins d’évasion, mais bien comme une amie qui nous conte son histoire. Et, au sein du genre de l’urban fantasy très coutumier de l’usage du « je » sensoriel,  je trouve cela sympathique.

    La structure est aussi plutôt intéressante puisqu’elle se découpe autant en axes qu’en chapitres. Une trentaine de chapitres, donc, se répartissent entre une demi-douzaine d’axes, définit par des thématiques ou des événements particuliers. Seuls les parties portent des titres, la plupart en anglais. Si je voulais pousser ma critique à fond, je dirais que j’aurais préféré des titres uniquement en anglais, mais c’est du détail et c’est vraiment, mais alors vraiment, subjectif. 😉

 

Personnages et Narrateurs

   Elena, protagoniste du récit, est donc une trentenaire qui a fait le choix de côtoyer la mort. Non pour des raisons morbides, comme beaucoup le pense, mais parce qu’elle voulait avoir une vision plus réaliste de celle-ci, se faire sa propre idée. Soutenue par sa famille, elle a suivi des études pour devenir thanatopractrice. Elle a une vie relativement normale et équilibrée jusqu’au décès de sa grand-mère. En découvrant l’envers du décors et la vie après la mort, elle change légèrement de comportement en s’éloignant de son entourage, perturbée par sa nouvelle capacité à voir les âmes des morts. Elle n’en reste pas moins une personne avec beaucoup d’empathie pour les défunts et leurs proches venant dans son établissement, tout en démontrant suffisamment de fermeté pour ne pas se laisser sombrer dans le chagrin ou se faire marcher sur les pieds. Si elle arbore des tatouages et qu’elle pratique un métier peu commun, elle ne défend pas l’idéal d’une femme badass comme on cherche souvent à en montrer dans ce type de récit. Elle est une jeune femme normale, avec ses doutes et ses faiblesses, et surtout cette magnifique humanité qui fait de chacune de ses rencontres avec les défunts, des moments vraiment émouvants et intelligents.

    Alvin et Marvin sont les jumeaux employés par Elena au sein de son établissement, le Pandemonium. Présents pour l’aider à accomplir sa mission, ils participent au bon fonctionnement de l’entreprise en allant chercher le corps des morts et en se chargeant de les mener dans leur dernière demeure. Inséparables, ils sont bien plus que des amis pour la jeune femme, puisqu’ils sont avant tout des protecteurs désignés par Hela pour la protéger des multiples risques provenant des Enfers. Ils sont plutôt sympathiques, apportent la petite touche d’humour du récit, mais avec une légèreté appréciable.

    Dernière venue au sein de l’entreprise, Morgane, une adolescente qui ressemble par beaucoup d’aspects à Elena. Ayant un point de vue similaire sur la mort et un forte propension à apaiser le quotidien de la jeune femme par de petites attentions, elle devient rapidement un élément essentiel au sein de Pandemonium, d’autant qu’elle ne semble pas vraiment effrayée par les différents aspects de la mort. Un personnage plutôt bien amené, même si j’ai moins aimé l’évolution un peu brutale qu’on lui accorde sur la fin. A mon sens, elle aurait pu rester « normale » dans un monde surnaturel, cela n’aurait rien ôté de son importance pour le récit.

    Bien d’autres personnages gravitent autour d’Elena, que ce soit les défunts et leurs proches sur Terre, ou les divinités infernales et les démons en Enfers. Tous ont leur caractère et leur fonction dans le récit, mais je dois dire que j’ai tout particulièrement apprécié les morts et leurs histoires.

 

Univers et Atmosphère

    Le premier univers que nous découvrons, et non des moindres, est celui des pompes funèbres. Ne riez pas, je vous assure que j’étais fascinée par les parties du récit qui se concentraient sur le travail d’Elena. Son rapport à la mort, au défunt, à son corps, mais aussi sa relation particulière avec les proches, tout cela est conté avec un telle simplicité et une telle douceur qu’on ne peut s’empêcher d’être en empathie avec l’ensemble des personnages qui évoluent au sein de l’entreprise. Pour tout ceux qui ont déjà vécu un décès dans leur entourage, je suis sûre que ces passages leur parleront, et même si cela peut tirer quelques larmes, il y a aussi ce sentiment de soulagement à se dire que ceux qui nous accompagnent dans nos derniers instants sont des gens bienveillants.

   Second aspect, moins terre-à-terre celui-ci, les Enfers. Comme leur nom l’indique, les Enfers sont multiples, soient autant de royaumes qu’il existe de divinités infernales pour les gouverner. Contrairement à beaucoup de récits de genre, les démons ont instauré un équilibre qu’ils tentent de respecter en s’attribuant les âmes défuntes selon certaines spécificités. Ainsi, Hela est la Déesse de ceux morts des suites de la vieillesse ou d’une maladie, quand Lucifer sera le souverain des Enfers Punitifs. Nous retrouvons ainsi nombre de divinités de la mort de diverses mythologies ou croyances, dans des royaumes bien séparés. La complexité de leur agencement et la difficulté d’y accéder permet ainsi de découvrir quelques royaumes par l’intermédiaire des péripéties vécues par Elena. Je regrette un peu que, comme dans beaucoup d’œuvres du genre, les divinités essentielles au récit soient principalement de culture occidentale, j’aurais bien aimé découvrir davantage les autres.

 

Intrigues et Thématiques

   Elena est déjà thanatopractrice lorsque sa grand-mère qu’elle adore décède. N’ayant jamais eu de croyances particulières sur la vie après la mort, cette vision est bouleversée lorsqu’un Messager des Enfers lui somme de se rendre auprès de Lucifer pour plaider en faveur de sa grand-mère. En effet, celle-ci aurait commis une faute par le passé qui la condamne aux Enfers Punitifs. Par amour pour sa grand-mère, Elena affronte le dieu infernal pour être finalement sauvée par Hela avec qui elle scelle un pacte : dix ans à son service en échange de la récupération de l’âme de sa grand-mère au sein de son royaume. Cinq ans plus tard, Elena est une passeuse d’âmes chevronnée qui nous fait découvrir son quotidien. Et pour être honnête ces premières parties, plus ancrées sur Terre, sont mes préférées. La relation qu’Elena développe avec les morts et leurs proches est à chaque fois passionnante, et j’aurais pu sans problème me contenter d’intrigues en relation avec cette capacité exceptionnelle.

   Mais il ne s’agit que d’une facette du récit, puisque des choses se trament en Enfers, et Elena, bien entendu, est en première ligne. Si au début, l’histoire m’a intriguée, que j’ai bien aimé évoluer entre les différentes divinités, j’ai été moins emballée par la fin, qui confère au personnage d’Elena des compétences et des devoirs de plus en plus importants, jusqu’à dépasser mon entendement. Je ne suis pas la plus réceptive concernant les histoires où tout dépend d’une personne, d’un objet, d’un instant ou d’un lieu. J’aime quand les choses sont plus aléatoires, quand il existe des possibilités. Après, il s’agit d’un choix de l’autrice, parfaitement assumé, et cela n’ôte en rien l’émotion que j’ai ressenti pour le premier aspect du récit.

   D’autant que l’autrice est assez habile avec ses ficelles narratives et que tout finalement prend sens à la fin. Attention cependant, si vous êtes comme moi, pointilleux à faire carburer votre cerveau pour comprendre chaque élément, et qu’en plus vous êtes du genre impatient, voire à lâcher un livre s’il vous semble incohérent. Tenez bon : l’explication vient plus loin (même si c’est embêtant de revenir en arrière pour vérifier de n’avoir raté aucune information, comme pour la lettre, par exemple). A l’inverse, j’ai été assez agacée par la bêtise d’Elena au sujet de Pandemonium (je crois qu’il n’y aura vraiment qu’elle pour ne pas comprendre ce dont il est question 😉 ). En tous les cas, l’intrigue est à mon goût bien rythmée et structurée, et au-delà des détails qui me sont personnels, je ne me suis pas ennuyée. 🙂

    Bien entendu, l’un des aspects importants de l’ouvrage, c’est la relation que le vivant entretient avec la mort et le deuil. C’est un aspect que j’ai beaucoup aimé, et je pense qu’il parlera à pas mal de monde. Qu’on ait ou non été confronté à la mort d’un proche, je pense que nous nous sentons tous plus ou moins concernés par la question, et le fait d’y faire face avec Elena, à travers différentes situations, différentes familles ou défunts, nous aide à nous poser les bonnes questions. Mine de rien, un livre de genre, ça fait aussi réfléchir. 😉

 

Conclusion

    Un ouvrage d’urban fantasy que j’ai apprécié lire, notamment pour cette volonté très humaine de présenter la mort et le deuil. Si la seconde partie du livre colle davantage à l’esprit du genre et enlève un peu de sa singularité au récit, elle reste relativement intéressante et rythmée, avec nombre de personnages mythologiques que les lecteurs apprécieront retrouver.

 

Et si vous alliez faire un tour du côté de Pandemonium ? 🙂

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Un aperçu d’ailleurs sur

Pandemonium ?

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N’hésitez pas à faire un tour sur les autres blogs de critiques littéraires pour vous faire un meilleur avis sur le sujet. 😉

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12 réflexions sur “[Chronique Littéraire] Pandemonium – Requiem pour un croque-mort, Aurélie Mendonça

  1. OmbreBones dit :

    J’ai lu ce roman dans le cadre du PIF et je l’ai vraiment adoré. Surtout, comme toi, cette façon de parler de la mort et du deuil. L’auteure s’est super bien documentée et elle a écrit plusieurs articles intéressants à ce sujet sur son blog 🙂

    Aimé par 2 personnes

    • bulledeleyna dit :

      Désolée, je réponds un peu tardivement sur cet article. ^^
      Oui, je trouve ça important de savoir parler de la mort de façon « humaine » (parce qu’on a souvent tendance dans les récits imaginaires à la dépeindre comme glauque, surnaturelle ou bien à l’occulter). Le travail du deuil, en particulier, est une chose que l’on voit peu dans les livres, alors que l’on fait souvent en sorte que les héros soient confrontés à la mort. Mais je doute que tous soient en mesure d’y faire face sans aide. C’est toujours bon de rappeler que dans un univers semblable au nôtre, il existe des personnes dédiées à cela. 🙂
      J’avais lu effectivement qu’elle s’était documentée, je pense que ça se ressent. 🙂

      Aimé par 1 personne

    • bulledeleyna dit :

      Ah vraiment désolée, je n’avais pas vu ton message en attente de validation. Décidément, cet article me joue des tours… :/
      Je pense que ce que l’on retient d’une lecture dépend aussi du contexte, du temps pris pour la lecture, ou encore de l’état d’esprit que l’on a au moment de cette découverte. Donc, oui, ça peut être intéressant de le relire. Après, ça reste aussi une question de goûts et d’attentes spécifiques. 🙂
      Merci en tout cas pour ton message et vraiment désolée pour le temps de réaction.

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      • Les Fantasy d'Amanda dit :

        Pas de soucis, WordPress m’a déjà fait le coup de classer des commentaires en indésirables, donc je ne les voyais qu’après très longtemps ^^
        Oui, tu as raison. Je l’ai lu très vite, ça l’a peut-être un peu desservi, mais j’en garde quand même une bonne appréciation 🙂. En fait, je crois que ce qui m’a le plus choquée, c’est la simplicité des débuts avec la gestion d’une entreprise de pompes funèbres, et la soudaine complexité de l’intrigue par la suite 😉

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  2. Yannick De ProseCafé dit :

    Bonjour
    J’ai trouvé ton analyse du livre très proche de ce que j’ai ressenti. Je le dis bien moins bien que toi, mais bien cela.
    Je souhaite une très bonne lecture à tes followers
    Léchouilles
    Yannick de ProseCafé

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