[Chronique Littéraire] Inhumaine : Retour aux Sources, Sophie Moulay

   Bien le bonjour, amis de la toile virtuelle. Pour aujourd’hui, je vous propose un peu de science-fiction post-apocalyptique avec Inhumaine : Retour aux Sources, de Sophie Moulay (Editions du 38).

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FICHE TECHNIQUE

 

  • Titre : Inhumaine : Retour aux sourcesimage
  • Auteur/Autrice : Sophie Moulay
  • Illustrateur/Illustratrice : Jeff Caïazzo
  • Édition : du 38
  • Collection : du fou
  • Genre : Science-Fiction, Post-Apo
  • Public : Adulte, Jeune Adulte
  • Cycle : one-shot
  • Pages : 268
  • Parution : mai 2018
  • Langue : Français
  • Format : Numérique – Broché
  • Prix :  3,99 euros – 16 euros
  • ISBN : 978-2374535500
  • Lien : Editions du 38 : Inhumaine

Résumé : 150/400 ans*(varie selon la version et ce n’est pas vraiment précisé dans le récit) après la montée des eaux et l’engloutissement de l’Europe, les anciens Blancs vivent en vaincus dans les quatre pays d’Afrique encore à sec. Pourtant, grâce à ses inventions, c’est l’un d’entre eux qui a rétabli la paix et la sécurité dans la nouvelle confédération, avant de disparaître. Roseau, une jeune blanche, sait cependant qu’il n’est pas le héros que l’on croit. À la recherche de son identité, elle part sur ses traces, mais son chemin est semé d’embûches. Poursuivie par les machines du savant et flanquée d’un improbable poète, fasciné par le monde d’avant et amoureux des vers du Doré, Roseau doit affronter sa réalité.

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MON AVIS

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Lu dans le cadre du Challenge Littérature de l’Imaginaire.

Lu dans le cadre du Printemps de l’Imaginaire Francophone.

 

Couverture et Accroche

   Je trouve la couverture assez attrayante, avec une mise en scène donnant un ton post-apocalyptique, entre la tenue futuriste de la protagoniste, la présence de petites créatures mécaniques, et l’ambiance façon tempête de sable. Malheureusement, elle n’est pas la plus représentative du contenu. Il n’y a pas de technologies qui permettent de créer de telles tenues, les créatures sont censées être des araignées mais elles ne semblent avoir que six pattes, et le désert n’a jamais été un réel obstacle dans le récit. Sans parler que les traits de la protagoniste me la donnait plus âgée, or elle n’a que 17 ans. A noter que je trouve le sous-titre de trop et qu’il fait doublon avec le résumé.

   Parlons du résumé justement, il me semblait très prometteur (je passe sur le problème de date, j’y reviendrai plus tard). Une catastrophe qui a condamné la population occidentale, retournant les rapports de force en faveur des peuples africains ? Voilà qui semblait être un excellent point de départ pour une quête des origines d’une jeune femme. Ma foi, je crois m’être fait un peu trop de faux espoirs. En soit, le résumé est très correct concernant l’intrigue, seulement, il ne faut rien attendre du contexte. Vous suivez une jeune fille qui cherche à comprendre ses origines. Point.

 

Prose et Structure

   La narration est menée à la troisième personne au passé et s’offre une plume fluide et simple, sans réel moment de fulgurance, mais parfaitement adaptée pour tous les publics. Malheureusement, elle se pare aussi de quelques maladresses, comme dire que les araignées sont des insectes, que la queue d’un lynx du désert peut s’enrouler autour de ses pattes (alors que sa queue est courte), ou encore affirmer qu’un personnage connaît les lieux comme sa poche pour dire un peu plus loin qu’il ne sait pas où se trouve un local. Il y a aussi parfois l’usage de paragraphes narratifs qui entrecoupent un dialogue, sans rapport avec les répliques, ce qui peut être un peu gênant pour ceux qui n’apprécient pas trop sauter du coq à l’âne pour revenir au coq. Mais si l’on exclut ces quelques petits défauts, le récit se suit sans problème.

   Le roman est découpé en plus d’une vingtaine de chapitres, souvent séparés par un souvenir de Roseau, l’héroïne, écrit en italique et au présent. Si j’apprécie le principe, d’autant que c’est l’un des moyens pour obtenir des informations sur le cataclysme qui a englouti l’Europe, je regrette que certains semblent moins utiles, car ne faisant que confirmer ce que l’on a pu comprendre dans le récit. Néanmoins, cela permettra certainement aux plus indécis des lecteurs de dissiper leurs doutes.

 

Personnages et Narrateurs

  Roseau est le personnage principal de ce récit, une jeune femme blanche, si tant est que la précision puisse avoir son importance. En vérité, et à mon grand regret, cela ne sert qu’à expliquer sa situation au début du récit, mais n’influence jamais vraiment ses péripéties. Il s’agit donc d’un voleuse de 17 ans, obligée de travailler pour un marchand de rêve, et qui en livrant un colis au palais du cheikh, se retrouve rattrapée par son passé. En effet, Roseau ne se considère pas tout à fait humaine, à cause d’expériences qu’on a pratiqué sur elle, ce qui la rend vulnérable, et surtout, désireuse de ne pas se mêler aux autres. Elle a un fort caractère, de celui qu’on prête aux enfants qui ont grandi dans la rue, et a appris la débrouillardise nécessaire à la survie. Si elle n’a pas peur de combattre ou de tuer, elle reste malgré tout une gamine un peu perdue qui ne sait pas trop quoi faire de ce poète qui a soudain décidé de la suivre.

   Le poète, c’est Cicade, un jeune homme blanc présent dans le palais du cheikh alors que Roseau tente de fuir. Bien qu’il est probablement dans les 25 ans (les âges ne sont jamais directement donnés, mais se calculent à partir de certaines explications), il se comporte comme un gamin inconscient, un peu perdu dans son monde de poésie qui, s’il est certes beau, l’éloigne un peu des contraintes de la réalité. Passionné par les grandes œuvres des anciens temps dont on ne connait presque plus rien, il rêve d’écrire son propre chef d’oeuvre, et c’est dans cet optique qu’il suit Roseau dans sa quête des origines. Son insouciance et sa joie de vivre, bien qu’un poil trop enfantine à mon goût, sauront heureusement remonter le moral de sa compagne de route.

   Difficile de parler des autres personnages, qui sont en réalité très peu nombreux. Il y a le cheikh Linker qui, bien qu’ennuyé d’avoir perdu son poète, traque les deux jeunes pour de plus obscures raisons. Et puis il y a Devereaux, le fameux inventeur dont il est question dans le résumé. Difficile d’en parler sans trop spoiler, sachez simplement que je m’attendais à ce qu’il ait accompli davantage de prouesses pour connaître une telle notoriété.

 

Univers et Atmosphère

   Malheureusement, on ne sait pratiquement rien de la catastrophe qui a submergé de nombreux continents (et surtout, de ses conséquences). En soit, c’est courant en post-apo. Sauf que généralement, les faits ont plusieurs siècles. Ici, il est difficile de dater. Sur le site de l’éditeur, c’est 150 ans, sur l’ebook, c’est 400 ans… Il m’étonne qu’une riche dynastie mette 400 ans pour préparer sa retraite loin de son Europe engloutie, j’opterais donc davantage pour 150 ans. Mais même si c’est 400 ans, on précise que la montée des eaux est lente, donc l’Europe ne s’est pas arrêtée de vivre du jour au lendemain. Pour preuve, Devereaux n’est pas né en Afrique et il a été bien éduqué, donc il existait encore quelque chose de l’Europe à sa naissance (on va dire 50 ans avant le début du récit). Même en justifiant par la traditionnelle mise au bûcher de toute la culture existante, l’oubli massif manque d’explications, surtout qu’il touche certaines choses et pas d’autres. Si on sait ce qu’est un ordinateur, une photo ou un panneau solaire, on ne sait plus ce qu’est une voiture ou une carte. Un fait qui me semble peu vraisemblable, comme il est plus courant de trouver une voiture qu’un ordinateur, même dans des lieux isolés. Qu’on me dise qu’elles sont inutilisables, je veux bien, mais qu’on ait jamais vu une seule carcasse alors que rien ne justifie leur disparition totale (surtout en comparaison de panneau solaire qui est un élément bourré de technologie)… Bref, ça manque d’explications pour comprendre la situation à l’époque du récit, et c’est bien dommage.

   Peut-être attendais-je trop de l’univers, mais il apparaît à mon sens qu’il n’a pas grande influence sur le récit. Les Blancs ont du quitter leurs terres, se réfugier en Afrique, accepter les lois du peuple natif. Et de tout cela, on ne sait presque rien. On sous-entend qu’il y a une ségrégation, mais elle n’influence pas le parcours de Roseau. Elle peut courir les routes, faire ses achats, louer une chambre à n’importe qui, on ne dit jamais que sa couleur de peau a un impact, si ce n’est que les Natifs lui parlent de façon un peu sèche (et encore, c’est elle qui l’affirme, le récit en lui-même ne le montre pas). Mais elle n’a aucune obligation à parler ou agir d’une certaine manière, elle ne subit aucune fouille ou regard haineux. La singularité de sa couleur de peau ne sert à rien, même si on insiste lourdement sur ce fait. Dès lors, je me suis demandée à quoi cela servait d’inscrire le récit dans un contexte où finalement, la ségrégation sert tout juste à dire que les Natifs ont des postes plus importants que les immigrés. Quelle morale en tirer, et surtout, pourquoi insister pour dire que les protagonistes sont blancs ? Cela n’aurait rien changé au récit qu’ils soient Natifs. Ou plutôt si, cela aurait permis d’avoir des protagonistes qui ne soient pas blancs, enfin. Une occasion manquée, selon moi. Après, cela n’empêche pas de suivre l’intrigue pour ce qu’elle est, une quête initiatique pour adolescent, peu importe sa couleur de peau.

 

Intrigues et Thématiques

   Roseau est une jeune Blanche aux services d’un marchand de rêve qui doit livrer un colis dans le palais du cheikh. Alors qu’elle croit avoir réussi son méfait, elle croise une araignée métallique qui émet d’étranges ondes qui la perturbent. Comprenant que le passé la rattrape, elle s’enfuit du palais avec l’aide de Cicade, un jeune homme qui se présente comme le poète du cheikh. Impressionnée par sa prestance, il décide de la suivre alors qu’elle prend la route afin de retrouver celui qui a créé l’araignée métallique, et qui tente désormais de la posséder.

   L’intrigue en elle-même est assez plaisante, même si elle s’étire un peu en longueur, la faute à Cicade qui traîne des pieds pour citer quelques vers du Doré. On se retrouve ainsi avec une quête assez adolescente, entre la compréhension du passé et la découverte de sentiments nouveaux. Si je ne vous cache pas qu’il y a de la romance dans l’air, elle a le mérite de ne pas être encombrante et de ne pas trop s’attarder sur les quelques clichés du Young Adult.

   Il y a un petit côté aventure assez agréable dans le récit, avec des déplacements loin des zones urbaines, comme des routes désertiques ou des traversées mouvementées de fleuve. Il y a aussi de légères incursions dans une science-fiction un peu plus technologique avec notamment une porte un peu particulière, même si on ne sait pas trop comment ça fonctionne et ce qui nourrit cette technologie (on connait l’électricité, mais on a besoin de pédaler, or dans les lieux abandonnés…). Globalement, pas mal d’idées, même si on reste un peu en surface.

 

Conclusion

    Inhumaine est davantage la quête initiatique de la jeune Roseau qu’un récit de science-fiction post-apocalyptique. Si je m’attendais à en apprendre davantage sur ce monde où les Blancs ont été contraints de débarquer sur la terre des Natifs, l’histoire tourne autour de la relation entre Roseau et le poète Cicade, ainsi que sur les manigances de Devereaux, le savant qui a rétabli la paix sur le continent et cherche désormais à s’emparer de Roseau. Si les intrigues de Young Adult vous plaisent, ce peut être pour vous une bonne aventure. Sinon, il est possible que vous soyez comme moi, un peu déçus de ne pas voir l’univers davantage exploité pour donner corps au récit.

 

Voulez-vous suivre Roseau dans sa traque de Devereaux ? 🙂

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UN APERÇU D’AILLEURS SUR

Inhumaine – Retour aux sources ?

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N’hésitez pas à faire un tour sur les autres blogs de critiques littéraires pour vous faire un meilleur avis sur le sujet. 😉

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15 réflexions sur “[Chronique Littéraire] Inhumaine : Retour aux Sources, Sophie Moulay

    • Eleyna dit :

      Après, j’imagine que suivant ce qu’on cherche, l’histoire peut être une vraie réussite comme une petite déception. Est-ce moi qui en attends un peu trop des récits post-apo ? J’ai parfois l’impression que certains se reposent sur la facilité à ne rien avoir à expliquer du contexte, contrairement au space opera ou à la fantasy. Bref, c’est mon point de vue personnel sur la question, mais je reconnais que la quête identitaire est plutôt réussie. 🙂

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  1. OmbreBones dit :

    J’avais déjà lu une chronique sur ce roman et la tienne confirme que ce n’est pas un livre que je vais lire, ça va me décevoir. J’aurai adoré qu’on exploite la ségrégation de ce point de vue là ! Quel dommage de laisser un sujet aussi riche de côté :/

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  2. leslivresderose dit :

    Je suis entièrement de ton avis concernant la ségrégation et le pourquoi du comment de tout cela! J’ai relu ma chronique (merci de l’avoir citée d’ailleurs :-D) et ce que j’en dis rejoins ton propos! J’en attendais aussi beaucoup à ce niveau ce qui clairement a joué sur mon ressenti! Sinon, les petites erreurs au niveau de la « rédaction » ne m’avait pas frappée (araignée => insecte,..etc). J’avais plutôt été séduite par le style de l’auteure! Sinon j’avais bien apprécié les personnages (je me souviens assez bien de Cicade surtout qui était différent du genre de personnage YA que je rencontre habituellement (pour ma part ;-)). Chouette chronique très complète en tout cas! =D

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  3. John Évasion dit :

    Les critiques à son égards étaient pas franchement top sur Babelio, j’ai hésité à me le procurer lors d’une opération numérique en promo mais ton avis confirme que j’ai fait le bon choix en allant vers d’autres titres. Bel article.

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    • Eleyna dit :

      Ah, je pense que c’est durant cette fameuse promo que je l’ai pris, justement. ^^
      Je voulais me faire une idée sur ce que proposais la ME, et le contexte annoncé m’attirait bien…
      Au final, petite déception, mais cet ouvrage plaira certainement davantage à ceux qui apprécient les quêtes identitaires.

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