[Chronique Littéraire] Le club des punks contre l’apocalypse zombie, Karim Berrouka

   Aujourd’hui, je vais vous parler d’une comédie horrifique sur des zombies, avec Le club des punks contre l’apocalypse zombie, de Karim Berrouka (Editions Actusf).

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FICHE TECHNIQUE

 

  • Titre : Le club des punks contre l’apocalypse zombie719cat60nhl
  • Auteur/Autrice : Karim Berrouka
  • Illustrateur/Illustratrice : Diego Tripodi
  • Édition : Actusf / J’ai lu
  • Collection : /
  • Genre : Horreur, Zombie, Humour
  • Public : Tout Public
  • Cycle : One-Shot
  • Pages : 416
  • Parution : mai 2016
  • Langue : Français
  • Format : Numérique – Poche – Broché
  • Prix : 5,99 euros – 8 euros – 18 euros
  • ISBN : 978-2-36629-816-1
  • Lien : ActuSF : Le club des punks contre l’apocalypse zombie

Résumé : (Actusf)

Paris n’est plus que ruines.

Et le prix de la cervelle fraîche s’envole.
Heureusement, il reste des punks.
Et des bières.
Et des acides.
Et un groupe électrogène pour jouer du Discharge.
Le Club des punks va pouvoir survivre à l’Apocalypse.
Enfin, si en plus des zombies, les gros cons n’étaient pas aussi de sortie…

Il est grand temps que l’anarchie remette de l’ordre dans le chaos !

Politiquement incorrect, taché de bière et de Lutte finale, Le Club des punks contre l’apocalypse zombie est un condensé d’humour salutaire.


(J’ai lu)

Les zombies ont envahi Paris. Un groupe de punks décide de profiter de la situation pour faire flotter le drapeau anarchiste sur la tour Eiffel. Mais, dans l’ombre, des rescapés du Medef ourdissent également un plan infernal.
Mêlant univers punk et humour, ce roman post-apocalyptique, ode à l’anarchie et à l’amitié, aborde aussi des questions de société.

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MON AVIS

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Lu dans le cadre du Challenge Littérature de l’Imaginaire.

 

Couverture et Accroche

    Deux couvertures, suivant que vous privilégiez la version brochée ou poche. LaLe club des punks contre l'apocalypse zombie première est ma préférée, déjà parce que j’aime beaucoup le style de Diego Tripodi (je l’avais déjà remarqué pour les couvertures des autres romans de Karim Berrouka). L’illustration stylisée au contour simple et facile à identifier, tout comme les choix des trois couleurs dominantes, correspond parfaitement à l’idée qui se dégage derrière le titre. Puis la mise en scène elle-même est plus proche du récit que celle de l’illustration pour la version poche. Celle-ci présente un style rappelant la BD d’horreur (tout comme la typographie du titre). Un choix qui plaira certainement à beaucoup, mais que je trouve personnellement moins atypique. Question de goût.

   Là encore, deux résumés suivant la version que vous achetez. Et là encore, personnellement, je préfère celui d’Actusf. On y perçoit bien mieux l’humour unique de Karim Berrouka et l’ambiance barrée de l’ouvrage. Mais ce constat ne m’étonne guère, les éditions dédiés à l’imaginaire connaissent leur affaire, et donc la façon de parler à leur lectorat, tandis que les éditions généralistes sortent des résumés plus convenus et passe-partout.

 

Prose et Structure

    Question style, j’ai été heureuse de retrouver la plume de Karim Berrouka, et plus encore. J’avoue m’être laissée porter par la prose, drôle, percutante et moderne, parfaitement adaptée à l’époque, au récit et aux protagonistes. Peut-être un peu surprise par l’étendue de la culture générale de certains punks décrits comme destroy et pas vraiment portés sur les activités « intelligentes », mais qui semblent malgré tout avoir le temps d’affiner leurs référentiels culturels et historiques (comme quoi, ne jamais se fier aux apparences ^^). Si j’ai, à ce titre, été un peu perdue dans les références musicales, j’ai en revanche été en parfait accord avec l’humour aussi bien déjanté que cynique. C’est simple, j’ai l’impression que contrairement à Celle qui n’avait pas peur de Cthulhu (qui se comprend mieux si on connait un minimum Lovecraft), l’humour s’adresse vraiment à tous les publics, même si on ne connait rien au mouvement punk. Alors certes, le trip est parfois poussé à son paroxysme, notamment durant la fin que j’ai adoré, mais qui peut expliquer la déception de certains lecteurs. Mais globalement, c’est un humour actuel qui fait facilement mouche.

   Niveau structure de récit, outre les traditionnels chapitres aux titres loufoques, on retrouve un découpage en trois actes, le premier s’amusant avec les tropes du genre zombie, les deux suivant faisant des incursions plus délirantes dans le fantastique. Jusqu’au grand final qui plaira plus ou moins selon vos attentes. Au sein de ces actes, on se retrouve avec un passage de relais plutôt intéressant entre les différents protagonistes impliquant notamment le principe de flash-back. De quoi jouer autant sur le suspense et les clichés, que la loufoquerie des situations et les points de vue réactionnaires de nos punks préférés.

 

Personnages et Narrateurs

    C’est sans contexte l’un des gros points forts du récit. Il est vrai qu’il fallait y penser au groupe de punks, anti-héros par excellence que tout le monde regarde de travers, même encore aujourd’hui. Et si l’auteur joue beaucoup avec les clichés sur cette communauté, adepte de drogues et profondément anarchiste, il nous présente une palette d’individus tous aussi délirants que délicieusement attachants.

   Eva, seule punkette à porter un prénom à consonance religieuse (ce qui n’est pas sans raison ^^), est considérée comme la madame anti-tout de la bande. Plus encore que les autres, et ce n’est pas peu dire. Représentante de la figure féminine et des valeurs qu’elle véhicule, elle a un côté bienveillant et maternant, mais à la sauce punk. Elle est d’ailleurs contre la violence, y compris pour repousser les zombies, mais elle n’est pas pour autant du genre à se laisser marcher sur les pieds. Surtout quand on la prend pour une princesse.

    Mange-Poubelle, détenteur de ce merveilleux pseudo pour la raison que vous imaginez, est l’expert en films de genre. Et en particulier en films de zombie. Premier à comprendre ce qui se déroule dans les rues de Paris, il sera d’une grande aide pour sortir sa bande des dangers typiques d’une histoire d’horreur… quoi que… Ingénieux, même si ses idées sont parfois dégoûtantes, il possède un excellent instinct de survie et surtout… il est moins défoncé que certains de ses amis. ^^

   Koprotkine, du communiste russe du même nom, est le leader de la bande. Anarchiste au sens noble du terme, il a la faculté naturelle à rallier les troupes, notamment parce qu’il sait bien parler, et que les autres sont un peu trop sous came pour le contredire. Idéaliste par excellence et fidèle à ses promesses, il est prêt à tout risquer pour libérer le peuple du joug capitaliste, même si cela implique de traverser une marée de zombies.

   Deuspi et Fonsdé, dont vous comprendrez rapidement les surnoms, sont deux punks destroy inséparables. Constamment défoncés au point de s’être grillé la plupart des neurones, ils sont prompts à commettre tout ce qui leur passe par la tête, de bien grosses conneries la plupart du temps. Si à deux, ils forment une masse délirante que leurs comparses doivent constamment surveiller, c’est pourtant isolés qu’ils révèlent tout leur potentiel… plein de surprise.

   D’autres personnages apparaissent plus ou moins tardivement dans le récit, même si peu au final possèdent une identité propre. Un choix qui se comprend par les partis pris plutôt clairs de l’auteur sur toute forme d’autorité, que ce soit les forces de l’ordre, mais surtout, ces vilains patrons du MEDEF. D’ailleurs, ils ne sont pas ouvertement les seuls à être balancés en pâture à la hargne zombiesque, puisque plusieurs noms connus traînent ici ou là, souvent pour le pire. ^^

 

Univers et Atmosphère

   L’histoire se déroule à Paris, à notre époque. Rien de bien folichon à décrire me direz-vous. Et bien, au risque de vous surprendre, je vais vous démentir. Car s’il est clair qu’il s’agit de notre époque, de notre société, le point de vue punk, lui, nous en présente une facette singulière. Celle de la débrouille, le squat de logements vacants, le système D, l’autosuffisance, les petits délits… Autant de détails qui font que les punks sont de parfaits survivalistes qui s’ignorent. Mieux encore, ce sont des non-consommateurs, des indépendants, des gens capables de surmonter l’effondrement d’un monde qu’ils ne supportent pas. Le meilleur exemple est l’absence totale de technologie et en particulier de l’usage des réseaux sociaux. Nos punks ne semblent même pas savoir ce que c’est, en tout cas ils n’en parlent pas une seule fois, ne songe même pas à trouver un téléphone pour se relier au reste du monde. Tout juste évoquent-ils la télévision avec réticence, un média d’un autre temps pour beaucoup de jeunes. Une façon plus terre-à-terre de présenter notre société donc, et de comprendre que même s’ils planent à dix lieues, ils sont parfaitement aptes à se passer de ce qui n’existe plus autour d’eux.

   Mais je sens que vous voulez parler de l’aspect plus horrifique du récit. Les zombies sont plutôt classiques, de l’aveu de notre expert de films de genre. Ils aiment la cervelle et la viande fraîche, mais ne prennent aucune initiative pour en trouver. Ils marchent lentement, tendent les bras et claquent des dents, et sont bien sûr insensibles à la perte de leurs membres. Seule façon de les tuer, viser la tête. Mais les zombies de Karim Berrouka sont bien plus que ça, et nos amis punks en font rapidement l’expérience. Une idée à la fois drôle et terriblement cynique, puisque bien entendu, vous n’êtes pas sans savoir que de nos jours, les zombies sont une métaphore de consommateurs qui se font laver le cerveau et se gavent de tout ce que leur procure le capitalisme. Non, vous ne saviez pas ? 😉

 

Intrigues et Thématiques

 Eva, Deuspi et Fonsdé pioncent dans leur squat barricadé du Collectif du 25 lorsque leur parviennent de la rue, des bruits suspects à base de hurlements, tirs et autres carambolages. C’est stupéfaits qu’ils découvrent que dehors, les gens se bouffent entre eux. Koprotkine et Mange-Poubelle parviennent à revenir au refuge et ce dernier ne tarde pas à leur dépeindre une bien étrange réalité : ils font face à une invasion de zombie. De quoi réjouir le leader des punks qui voit enfin l’occasion parfaite de défendre les valeurs de l’anarchisme.

   Le ton est donné et si le premier acte nous embarque dans un scénario déjanté moquant les clichés du genre, ce n’est pas pour trouver un refuge et fuir les zombies, mais bien pour faire un gros doigt d’honneur au capitalisme qui s’effondre. Ici, on voit rapidement poindre la critique sociétale, à commencer par le désamour des punks pour les représentants de l’ordre, gros bourrins pratiquant le délit de faciès et l’abus de pouvoir ; mais aussi les médias d’états, et plus particulièrement la télévision, tour infernale où s’accumuleront des visages plus ou moins connus, plus ou moins haïs, symptômes d’une époque que les punks rejettent en bloc.

   Les deux actes suivant, s’ils partent rapidement dans un délire plus fantastique, s’attaquent aussi plus clairement aux grands dogmes sociétaux, que sont la religion, mais surtout la hiérarchie d’entreprise, mal incontesté représenté par des patrons détestables, désireux de dominer un monde mort et d’en exploiter les dernières richesses jusqu’à leur épuisement, sans comprendre que tout est déjà perdu et que le modèle auquel ils se raccrochent mourra avec eux. La question étant bien entendu de savoir s’ils emporteront tout le monde dans leur sillage. Mais ne croyez pas être épargnés, chers amis, car s’il y a bien une caricature qui se décline de bien belle façon, c’est celle du zombie. Autrement dit, vous, moi, le commun des mortels, voué à perdre sa cervelle et à s’imaginer pouvoir la récupérer en bouffant celle des autres. Oui, la critique s’adresse à tout le monde, et si elle est frontale pour les patrons, les flics et les religieux, elle n’en oublie pas moins que nous sommes un peu tous dans le même bateau. A part les punks, bien entendu. 😉

   Mais ne vous en faites pas, le récit n’oublie pas son humour en chemin, puisque bien au contraire, il nous offre des successions de visions, sortes de trip mêlant références artistiques et religieuses, en alternance avec une visite guidée dans les plus beaux quartiers de Paris… ou du moins ce qu’il en reste. Ajoutez à cela une importance capitale de la musique et un certain goût pour l’art « viscéral », et vous aurez de quoi faire votre journée. 😉

 

Conclusion

   Le club des punks contre l’apocalypse zombie est un ouvrage d’une grande justesse, que ce soit dans son humour déjanté et cynique, la déconstruction des clichés de genre ou encore le traitement de ses thématiques sociétales. Nos amis punks représentent les anti-héros par excellence, des individus imparfaits auxquels on ne peut s’empêcher de s’attacher, tant résonne dans leurs provocations et leurs discours militants notre propre besoin de liberté. Un ouvrage à lire de toute urgence pour ceux qui ne l’auraient pas encore fait.

 

Et vous, envie d’affronter les zombies avec un groupe de punks ? 🙂

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